Michele Pertusi (Guillaume), Antonino Siragusa (Arnold) dans Guillaume Tell à Zurich
Prise de rôle et prise de risque pour Antonino Siragusa à Zurich. En ajoutant Arnold de Guillaume Tell à son répertoire, le ténor sicilien n’a pas la choisi la facilité : vingt-deux contre-ut, l’équivalent de trois Faust et dix Rigoletto, d’après Tony Poncet qui, dans les années 60, en fit son cheval de bataille1. Un exploit auquel Antonino Siragusa apporte une vaillance incroyable – toutes les notes sont là, balancées crânement – mais pas seulement. Le chant sait aussi, quand il le faut, déposer les armes et se montrer plus subtil que certains ont bien voulu le dire. La vocalise s’autorise de surprenantes légèretés dans le duo avec Mathilde et « Asile héréditaire » ne rechigne pas à la nuance. Ces parenthèses élégiaques exceptées, quel punch ! Trio patriotique survolté, cabalette vengeresse (malgré l’absence de soutien du chœur – une fantaisie d’Adrian Marthaler, le metteur en scène, qui le place à ce moment dans la coulisse), rien ne parvient à faire trébucher une voix que le volume et l’éclat surexposent. Seul le français sonne encore un peu exotique. A applaudir jusqu’au 7 décembre en attendant que d’autres maisons d’opéra, conquises par cet Arnold, osent à leur tour programmer Guillaume Tell (dont on sait que l’un des principaux obstacles à la représentation est précisément de disposer d’un ténor suffisamment vigoureux pour chanter le rôle). Christophe Rizoud