Pour le public des récitals du Théâtre Royal de la Monnaie (Bruxelles), habitué au piano-chant et à la forme liederabend, la soirée d’hier, 15 mai, avait quelque chose de bien inhabituel. Entièrement consacré au répertoire italien du XVIIe siècle, le concert proposé par Anna Caterina Antonacci, intitulé Combattimenti e lamenti, faisait intervenir tout un petit orchestre, l’academia degli Astrusi, dirigé du violoncelle par Federico Ferri. Le programme alternait les pièces instrumentales et vocales, avec au total huit airs seulement, mais sans beaucoup de diversité de caractère, les lamenti l’emportant largement en nombre sur les combattimenti. On y a fait au passage d’heureuses découvertes, comme ce Lagrime mie de Barbara Strozzi, ou le Pazza venuta da Napoli de Pietro Antonio Giramo, véritable petit drame en musique.
Abordant avec prudence un répertoire relativement neuf pour elle, la soprano italienne déploie un timbre de toute beauté et un sens du texte fort à propos, les qualités qu’on lui connaît depuis une bonne vingtaine d’années. Les Astrusi en revanche apportent moins de soin dans leur interprétation : justesse approximative et manque de couleurs dans les parties purement instrumentales font que bien vite l’ennui guette… L’aboutissement de ce concert est sans conteste le Combattimento di Tacredi e Clorinda de Monteverdi que la chanteuse rend avec un grand luxe d’effets théâtraux, un engagement total et un sens narratif particulièrement démonstratif, ce qui en fait, malgré le peu de relief de la partie instrumentale, le moment le plus abouti de la soirée. [Claude Jottrand]