La fermeture pour rénovation du Teatro Comunale de Bologne ne signe pas pour autant la fin de la vie lyrique dans l’auguste capitale de l’Émilie-Romagne. L’institution installera ses cartons, ses tringles et ses boîtes à chapeau au Teatro EuropAuditorium (notez le jeu de mot habile et facétieux sur le chevauchement de l’A, lequel a probablement dû faire l’objet de bien des palabres dans une agence de communication) dont l’inauguration aura lieu le 28 janvier (Der Fliegende Holländer, dirigé par Oksana Lyniv). Et pendant ce temps, devant le Comunale désert, prend place une exposition intitulée « 260 ans d’opéra sur 24 mètres ». 24 mètres, donc, de panonceaux revenant sur les temps forts du théâtre (lequel porte en ce moment les couleurs de l’Ukraine).
Dix-huitième siècle
1763 : Ouverture avec le Triomphe de Cloelia de Gluck, soulignant déjà l’affinité des bolognais pour la culture germanique.
1770 : Le jeune Mozart, alors âgé de 14 ans, s’arrête pour prendre des courts de contrepoint rigoureux auprès du débonnaire Père Martini.
1799 à 1811 : Rossini fait ses premières armes dans la ville.
Dix-neuvième siècle
1805 : Napoleon – qui s’était attiré les foudres des locaux en prétendant déboulonner la statue du bon Pape Grégoire XIII de la Piazza Maggiore –, organise un bal à l’opéra dans lequel se produit le castrat Tacchinardi.
1815 : Donizetti, à son tour, passe par Bologne et, sans prétendre déboulonner quiconque, lui, dirige la création du Stabat Mater de Rossini à l’Archiginnasio. Il y compose son premier opéra, Il Pigmalione, au moins aussi oublié que la Chlelia de Gluck (que fait le Palazetto Bru Zane ?).
1853 à 1865 : Le théâtre est en travaux.
1867 : Première italienne du Don Carlos de Verdi, qui perd un acte et devient Don Carlo. Les répétitions sont tendues et la première doit être décalée.
1871 : Création italienne de Lohengrin (Lohengrinno ?) et premier opéra de Wagner à être représenté en Italie. On dit que Verdi se serait discrètement faufilé dans une loge pendant les répétitions pour se faire une idée de la musique de son turbulent concurrent.
1875 : Le Mefistofele de Boito, qui n’avait pas eu beaucoup de succès à la Scala, triomphe à Bologne.
1888 : Tristano, finalmente.
Vingtième siècle
1910 : Création d’une opérette participative d’Ottorino Respighi et, plus tard, celle de Semirama, son grand opéra qui n’a pas non plus, il faut bien le reconnaître, bouleversé le paysage lyrique.
1931 : Toscanini est giflé par des partisans fascistes parce qu’il ne veut pas diriger la Marcia Reale et Giovinezza (hymne douteux).
1935 : Incendie et réouverture.
1940-1945 : Le Comunale échappe aux bombardements alliés, contrairement à la moitié des immeubles résidentiels de la ville.
1969 : Luciano Pavarotti et Mirella Freni – stars d’Émilie – se produisent ensemble dans I Puritani.
1977 : Alors que des manifestations extrêmement violentes opposent sur la place Verdi des étudiants aux forces de police (la mort de Francesco Lorusso en sera le point culminant), Riccardo Muti donne par deux fois le Requiem de Verdi. Sur la place, le public de Première se mêle aux manifestants dans un tableau sociologique inouï.
1981 : Cinquième restauration.
1985 à 1993 : Règne de Riccardo Chailly (celui de Daniele Gatti, par contre, ne fait pas l’objet d’un panonceau spécifique).
2020 : La pandémie a raison des activités du théâtre, l’orchestre y joue au milieu du parterre, avec masques.
2022 : Fermeture pour quatre ans, les travaux s’étendront jusqu’en 2026.