Damien Guillon enchante Ambronay

Le récital donné par le contre-ténor Damien Guillon avec le luthiste Éric Bellocq a constitué l’un des grands moments du festival d’Ambronay. Sans ostentation ni gestuelle dramatique (Damien Guillon reste assis), le chanteur semble émettre le plus naturellement du monde les sons raffinés d’une voix maîtrisée par une technique impressionnante, qui donne le sentiment de l’évidence et de la sincérité. Tant la justesse que la richesse du timbre, le travail du souffle et la qualité du phrasé, font que d’emblée tout sonne juste et touche sans faillir. Dans la salle Monteverdi, le public très nombreux est comblé par la beauté des Lute Songs de John Dowland, qui alternent en un échange continuel avec des pièces instrumentales. La diversité des rythmes, les transitions d’un affect à l’autre (des sanglots aux sourires, des larmes à la moquerie) font des textes et des mélodies les éléments constitutifs d’un univers daté par son langage verbal et musical, mais qui reprend vie et actualité, qui nous parle. Chacune des miniatures que sont les pièces vocales est véritablement ciselée par Damien Guillon, chaque note est calibrée, chaque intonation millimétrée, mais sans aucune préciosité, et sans qu’à aucun moment l’effort ne soit perceptible, ni le travail. C’est comme une évidence, renforcée par la simplicité d’un très grand, assurément, qui reste chaleureux et proche de son public, dans son sourire comme dans les mots qu’il utilise pour remercier et annoncer les bis : après « Tell me, true love », une reprise du célèbre « Flow, my tears » est interprétée avec une sobriété de moyens qui ne fait que davantage ressortir la puissance lyrique de ces Lute Songs. [Fabrice Malkani]