En 1943, Frank Martin en tirerait Six monologues pour baryton et orchestre, mais avant d’en arriver là, le Jedermann concocté par Hugo von Hoffmansthal en 1910 d’après un mistère médiéval anglais, et représenté chaque année à Salzbourg devant la cathédrale, inspira à Sibelius une musique de scène qui fut créée en 1916. Le label Naxos en publie une nouvelle version dirigée par Leif Segerstam. La première ne date que de 1995, dirigée par Osmo Vänskä, avec notamment Lilli Paasikivi. Pourtant, qu’on ne s’y trompe pas, la voix n’occupe dans cette œuvre qu’une place très réduite : la soprano n’a guère plus d’une minute à chanter, le ténor n’intervient que dans un numéro, d’une durée de trois minutes, et la basse est là une minute et demie. Le chœur est un peu plus présent : neuf minutes en comptant le très beau Gloria final. Sur cinquante minutes de musique, c’est peu. Tout le reste appartient à l’orchestre, notamment un superbe « Largo, sempre misterioso » où le violon crée une ambiance mortifère (numéro qui représente à peu près un tiers de la partition), ou un « Largo e mesto – Doloroso – Con grande dolore ». Rien de bien joyeux dans ce Jokamies, on s’en doute, et le reste du programme n’est ni plus gai, ni plus vocal. L’In memoriam de 1910 fut joué lors des obsèques du compositeur en 1957, et malgré leur nom, les Deux mélodies sérieuses de 1914-15, assombries par la guerre, ne chantent guère plus, puisqu’elles sont écrites pour violon et orchestre.
Jedermann (Jokamies), op. 83 / Deux mélodies sérieuses, op. 77 / In memoriam, op. 59, Pia Pajala, soprano, Tuomas Katajala, ténor, Nicholas Söderlund, basse, choeur Cathedralis Aboensis, Mikaela Palmu, violon, orchestre philharmonique de Turku, Direction musicale : Leif Segerstam. 1 CD Naxos 8.573340, 72’50