A partir des meilleures notes attribuées par nos rédacteurs aux livres, CD et DVD sortis cette année, proposition amoureuse dans le désordre de quelques cadeaux à déposer au pied du sapin des amateurs d’opéra le 25 décembre prochain.
1. André Lischke, Guide de l’opéra russe (Fayard)
André Lischke, déjà auteur de tant d’ouvrages essentiels sur la musique russe, propose chez Fayard un Guide de l’opéra russe, indispensable pour approfondir ces connaissances sur les grandes œuvres du répertoire ou se préparer à la découverte d’ouvrages encore trop peu représentés en Occident.
2. Sabine Devieilhe, Mirages. Opera Arias and Songs (Erato)
Elle est aujourd’hui la Lakmé dont tous rêvent, elle fut une superbe Mélisande, elle aurait dû être en scène une Olympia incomparable. Sabine Devieilhe nous devait un disque d’opéra français. C’est désormais chose faite, et admirablement faite.
3. Terry Wey, Pace e guerra (Deutsche Harmonia Mundi)
Vous n’avez jamais entendu parler du contre-ténor Terry Wey et les prétendus hommages de ses pairs à des castrats (Senesino, Carestini, Farinelli) vous ont laissé sur votre faim ? Vos réticences sont bien légitimes, car à l’exception de Franco Fagioli (Caffarelli) et de Iestyn Davies (Guadagni), les falsettistes n’ont pas souvent les moyens de leurs ambitions. Terry Wey a pris son temps et ce premier récital en hommage à Antonio Maria Bernacchi (1685-1756), se déguste comme un fruit mûr, pulpeux, gorgé de saveur.
4. Ann Hallenberg, Carnevale (Pentatone)
Avec treize premières mondiales au programme d’un récital consacré aux opéras composés à Venise à l’occasion du carnaval, Ann Hallenberg renouvelle l’exercice et nous offre une magnifique leçon de bel canto. A la tête d’un Pomo d’Oro aux couleurs profuses, Stefano Montanari n’offre pas seulement un soutien idéal à la diva: il signe une véritable mise en scène sonore.
5. Juan Diego Florez, Mozart Album (Sony)
Sous la direction de Riccardo Minasi, Juan-Diego Flórez dessine à sa convenance une galerie de héros mozartiens qu’il nous semblait jusqu’alors connaître et que nous découvrons sous un jour nouveau. Un album dont on se prend à rêver d’un deuxième volume.
6. Monteverdi – Night. Stories of lovers and Warriors (Naive)
Présenté sous le titre de Night. Stories of lovers and warriors, le corpus de ces quelques madrigaux « nocturnes » de Monteverdi frappe par son originalité. Hor che’l ciel e la terra côtoie le Combattimento et Al lume delle stelle répond directement au Lamento della ninfa, le tout dans un surprenant patchwork mêlant chefs-d’œuvre et raretés. Résumons: la nuit va bien à Monteverdi, et Rinaldo Alessandrini à la tête du Concerto Italiano se charge de nous le prouver.
7. John Osborn, A Tribute to Gilbert Duprez (Delos)
John Osborn fait revivre la voix du ténor légendaire Gilbert Duprez (1806-1896) en un album d’une dizaine de titres. Le défi n’était pas sans risque compte tenu de la difficulté des partitions abordées ; il est relevé à tout point de vue. Le chanteur américain va au-delà de la résolution des problèmes techniques pour transmettre la juste émotion, d’un chant qu’il est nous est arrivé de trouver sur scène impassible et que l’on découvre ici au contraire animé et vivant au point de contredire l’objet même de son hommage (à en croire Berlioz, l’expression n’était pas la qualité première de Gilbert Duprez).
8. Regine Crespin, a tribute (Warner)
Warner rend hommage à Régine Crespin à l’occasion de la dixième année de sa disparition en un coffret de dix CD qui respecte les programmes des différents récitals gravés à partir de 1958 jusque dans les années 1970. Diverses compilations complètent le portrait de la plus grande soprano française de l’après-guerre, qui n’eut jamais dans son pays la reconnaissance qu’elle avait pourtant amplement méritée.
9. Camille Saint-Saëns, Proserpine (Palazetto Bru Zane)
Créé à l’Opéra-Comique le 14 mars 1887, Proserpine, un drame lyrique en quatre actes de Camille Saint-Saëns, renaît grâce aux efforts du Palazetto Bru Zane. Si l’absence d’airs au format traditionnel a nui à la fortune de ce drame lyrique aux accents wagnériens, la musique admirablement écrite, présente des atmosphères variées. L’enregistrement de studio, réalisé en parallèle des concerts donnés à Munich et à Versailles, nous renvoie à l’âge d’or des intégrales légendaires pour lesquelles on réunissait les artistes préférés des grands labels. Ici, ce sont les chanteurs préférés du Palazzetto Bru Zane que l’on entend, et ils valent bien les gloires d’antan.
10. Giuseppe Verdi, Un ballo in maschera (C Major)
Grâce à la publication en DVD d’Un ballo in maschera capté à Munich en mars 2016, la mise en scène de Johannes Erath apparaît d’une virtuosité stupéfiante qui tisse autour du mélodrame verdien un réseau de variations d’une ingéniosité diabolique. Entre surréalisme et cinéma de l’entre-deux-guerres, on songe à un Magritte comme L’Assassin menacé, mais où les chapeaux melon auraient été remplacés par des hauts-de-forme, l’élixir d’oubli recommandé par Ulrica devenant un très hitchcockien verre de lait. A ce brio scénique s’ajoute une distribution réunissant ce que l’on peut aujourd’hui espérer de mieux dans les principaux rôles (Anja Harteros, Piotr Beczala, George Petean dirigés par Zubin Mehta).