En ce dimanche après-midi, c’est devant une salle archi-comble que s’est levé le rideau de l’Opéra Bastille pour la deuxième représentation d’Otello. Les échos de la première n’étaient guère rassurants pour les spectateurs dont certains étaient venus de loin pour applaudir Roberto Alagna. Le ténor allait-il chanter ? Oui, si l’on en croyait les affiches dans le hall qui annonçaient une dédicace à l’issue du spectacle, mais allait-il être en forme jusqu’au bout ? Ne risquait-il pas de jeter l’éponge avant la fin du spectacle ? Les premières mesures de l’ « Esultate » lancé d’une voix claironnante ont d’emblée rassuré le public. Roberto Alagna s’est montré en bonne forme durant les deux premiers actes, c’est à peine si l’on se rendait compte qu’il ménageait un peu sa voix, tant son incarnation était convaincante. Après l’entracte, suspense. Comme le chef tardait à arriver, chacun craignait qu’apparaisse sur la scène quelqu’un pour annoncer que le ténor était souffrant. Mais non. Et lorsqu’Alagna commença à chanter, pas le moindre graillon ne vint gêner son émission vocale. Mieux, plus la représentation avançait plus il ouvrait les vannes pour finalement tout donner dès son « Dio mi potevi scagliar » déchirant, jusqu’à la scène finale proprement hallucinante. Aleksandra Kurzak n’était pas en reste, sa Desdémone a paru supérieure encore à celle de la première et tous deux ont été longuement ovationnés durant les saluts. La joie d’avoir pu offrir au public parisien un Otello de haute volée pouvait se lire sur le visage souriant du ténor. Souhaitons que les prochaines représentations confirment cette forme retrouvée.