Le label Alpha s’engage depuis sa création sur des projets exigeants, souvent originaux et novateurs. De la dernière vague de 14 rééditions de CD, dont beaucoup furent récompensés à leur sortie, trois retiendront davantage l’attention des amateurs de chant.
Du plus illustre compositeur du XVe siècle, Guillaume Dufay, nous est offerte la messe « Se la face ay pale », dont la teneur – chanson profane dont il était l’auteur et qui lui avait valu la célébrité – parcourt les cinq mouvements. Le propre (repris d’un missel contemporain de Cambrai, et du Codex de Trente,Trento 88) permet de restituer cette polyphonie extraordinaire dans son contexte liturgique. Le choix d’Antoine Guerber de voix d’hommes (Diabolus in musica), comme leur effectif et le recours exclusif au chant a cappella sont justes et bienvenus.
Le manuscrit de Luigi Rossi est un reflet exceptionnel de la production italienne du début du XVIIe S. Le CD en retient treize pièces de huit compositeurs du temps, dont un anonyme. Le rare Lamento d’Olimpia, de Monteverdi y rencontre celui d’Arianna, mais aussi des pièces variées de Gesualdo et de compositeurs moins célèbres. Trois pièces de Arcadelt (Ancidetemi pur), de Lassus (Susanne un jour) et de Jacques de Wert (Cara la vita mia), adaptées par Bassani (à ne pas confondre avec Bassano) et Trabaci nous rappellent combien les transcriptions les plus riches circulaient alors. L’alternance de pièces instrumentales et vocales, les expressions contrastées donnent une chaleur particulière à cet enregistrement. La harpe de Marion Fourquier, soliste ou accompagnatrice, le chant de Lucien Kandel et de Cristiana Presutti nous valent de beaux moments d’émotion.
Sous le titre Vêpres pour Saint-Louis, apocryphe, sont regroupées intelligemment des œuvres de Charpentier, dans l’ordre imposé par la liturgie. Ces pièces brèves, toutes d’une durée inférieure à 10 minutes, auraient pu être ainsi ordonnées pour la fête du Roi, la Saint-Louis. Le motet In honorem Sancti Ludovici Regis Galliae Canticum (…), H 323, trouve ici sa place, idéale. L’écriture variée, confiée à des formations contrastées, contribue à une écoute renouvelée d’où l’attention n’est jamais distraite. Les interprètes, que dirige Olivier Schneebeli, sont exemplaires dans un répertoire qui leur est familier.
Bien qu’à petit prix, ces enregistrements bénéficient d’une notice complète et d’une présentation toujours aussi soignée. A recommander, sans réserve.