L’épidémie de Covid-19 a entraîné la fermeture une à une de quasiment toutes les salles de spectacle européennes. En conséquence, toutes les productions ont été annulées du jour au lendemain. Et les artistes se sont retrouvés de facto sans emploi. Néanmoins, de nombreuses incertitudes demeurent sur les contrats des chanteurs et chefs d’orchestre non salariés permanents des maisons d’opéra, selon que la crise actuelle relève ou non du cas de force majeure par exemple, ou que cet arrêt soudain de leur activité leur permette ou non d’ouvrir leurs droits au régime des intermittents. Une conséquence gravissime pourraît être l’absence totale de rémunérations pour les artistes. Si plusieurs agents ont dès la semaine dernière commencé à s’organiser pour demander des éclaircissements, les réponses reçues par les artistes diffèrent assez sensiblement, et cette cacophonie ajoute au risque sanitaire l’angoisse de fins de mois extrêmement difficiles voire dramatiques.
Renaud Capuçon a interpellé Franck Riester pour lui demander la création d’un fonds d’urgence pour les artistes comme en Allemagne. Les artistes lyriques de France ont à leur tour rédigé ce matin un communiqué que nous reproduisons intégralment ci-dessous. Espérons que cet appel soit à présent entendu…
Lettre ouverte du Collectif des Chanteurs Lyriques de France:
FERMETURE DES SALLES DE SPECTACLES: LE CRI DU CŒUR DES CHANTEURS LYRIQUES!
Dans le contexte sanitaire difficile que connaît actuellement le pays, les artistes lyriques réunis en collectif souhaitent, dès aujourd’hui, attirer l’attention des pouvoirs publics sur la gravité des situations professionnelles et personnelles qu’entraîne la crise actuelle.
Nous avons bien conscience que l’urgence est aujourd’hui de s’occuper des personnes les plus fragiles face à ce fléau dont il faut impérativement stopper la propagation mais il est important de réfléchir à ses conséquences sociales.
La totalité des institutions du milieu de la musique classique, maisons d’opéras et salles de concerts, ont décidé d’annuler l’intégralité de leurs représentations.
Si nous prenons collectivement la parole aujourd’hui c’est que la crise sanitaire actuelle accentue dramatiquement un état de précarité́ et d’isolement dans lequel nous sommes déjà.
De plus en plus de théâtres annoncent désormais leur fermeture complète et nous assistons à une accumulation inédite de ruptures unilatérales de contrats dans toute notre filière : notamment chez les solistes, les artistes du chœur, instrumentistes, chefs d’orchestres, metteurs en scène, danseurs, techniciens, figurants, chefs de chant, agents artistiques que nous aimerions tous associer à notre démarche. Notre métier est une passion mais cela ne doit pas nous faire oublier la réalité: la rupture sèche d’un ou de plusieurs contrats concernant les prochains mois signifie l’arrêt total de notre activité professionnelle ainsi qu’une perte immense d’opportunités artistiques, en particulier pour les plus jeunes d’entre nous.
Dans le droit du travail français, les artistes du spectacle vivant sont salariés en « CDD d’usage ». Ces contrats, négociés directement avec les entreprises organisatrices sont le fruit de longues années de travail et d’attente. Par ailleurs, ils ouvrent droit au régime d’indemnisation chômage dit de «l’intermittence du spectacle ». Ces contrats sont essentiels pour nous à plus d’un titre. Tout d’abord, ils constituent notre principale et souvent unique source de revenus. D’autre part, il s’agit d’un enjeu de carrière : un contrat peut avoir des conséquences décisives dans le développement d’une carrière artistique. Enfin, ils sont les pièces centrales du calcul de nos heures qui nous permettent de bénéficier du filet de sécurité́ indispensable que constitue l’intermittence.
La rupture de ces contrats est normalement encadrée par le droit du travail mais, la situation actuelle étant sans précédent, nous obtenons une pluralité́ de réponses de la part de nos employeurs. Un certain nombre d’entre eux font leur maximum pour ne pénaliser personne, au risque parfois de mettre en danger leur trésorerie, cependant certains chanteurs semblent devoir renoncer à l’intégralité de leur salaire.
Sommes-nous dans un cas de force majeure ? Si oui, l’épidémie du Covid-19 caractérise-t-elle un « sinistre relevant d’un cas de force majeure » au sens de l’article 1234-4 alinéa 2 du code du travail ? Le cas échéant, cette disposition d’ordre public prohibe une rupture unilatérale du CDD à l’initiative de l’employeur sans indemnité́ au profit du salarié, nonobstant toute clause contractuelle contraire.
– Sommes-nous, en tant que salariés (même en CDD d’usage) éligibles à la procédure de chômage partiel annoncée ? Si ce n’est pas le cas, est-il juste que nous soyons exclus de la promesse de l’État de ne laisser aucun salarié perdre son emploi ?
– Comment seront décomptées les heures perdues dans le calcul de notre statut ?
– Quelles compensations aux pertes d’opportunités sont envisageables ?
Nous avons besoin de réponses claires face à la gravité d’une crise qui menace l’avenir d’un grand nombre d’artistes et accentue fortement la précarité́ dans laquelle se trouvent déjà certains d’entre eux. Nous en appelons à notre Ministère de tutelle, ainsi qu’au Ministère de l’économie et à Monsieur le Premier Ministre. L’art et la culture sont essentiels à notre société et au rayonnement de notre pays dans le monde. Nous en sommes les fiers représentants en France et ailleurs. A ce titre nous méritons de ne pas être traités comme de simples variables d’ajustement soumis aux décisions arbitraires de certains employeurs.
Nous demandons qu’aucune décision relative aux annulations de contrats et au règlement des salaires ne soit prise tant que le cadre légal n’a pas été́ défini. Nous sommes prêts à consentir des efforts dans cette épreuve commune mais, en aucun cas, à en sacrifier notre avenir d’artistes.
Nous espérons tous rapidement retrouver la scène et notre public, notre plus grand soutien.
Une fois cette épreuve surmontée, il sera indispensable, dans le pays de l’exception culturelle, que s’ouvre un débat de fond sur la protection statutaire de nos métiers du spectacle.
Roberto Alagna
Kévin Amiel
Guillaume Andrieux
Frédéric Antoun
Gaëlle Arquez
Jean-Luc Ballestra
Stanislas de Barbeyrac
Clémence Barrabé-Hamon
Hasnaa Bennani
Cassandre Berthon
Christophe Berry
Julien Behr
Benjamin Bernheim
Thomas Bettinger
Yann Beuron
Jean-Vincent Blot
Antoine Bonelli
Jean-François Borras
Jean-Sebastien Bou
Jérôme Boutillier
Ambroisine Bré
Raphaël Brémard
Rodolphe Briand
Chloé Briot
Sylvie Brunet-Grupposo
Hélène Carpentier
Albane Carrère
Frédéric Caussy
Nicolas Cavallier
Adèle Charvet
Pierre-Antoine Chaumien
Julie Cherrier-Hoffmann
Anaïs Constans
Marine Costa
Jennnifer Courcier
Nicolas Courjal
Marianne Croux
Marianne Crebassa
Edwin Crossley-Mercer
Jeanne Crousaud
José van Dam
Thibault de Damas
France Dariz
Romain Dayez
François de Carpentries
Stéphane Degout
Camille Delaforge
Mireille Delunsch
Jean-Marie Delpas
Emmanuelle de Negri
Antoinette Dennefeld
Léa Desandre
Karine Deshayes
Charlotte Despaux
Sabine Devieilhe
Jodie Devos
Frédéric Diquero
Olivia Doray
Pierre Doyen
Julien Dran
Isabelle Druet
Cyrille Dubois
Yoann Dubruque
Alexandre Duhamel
Christophe Dumaux
Catherine Dune
Sarah Dupont d’Isigny
Anne-Sophie Duprels
Philippe Ermelier
Philippe Estèphe
Mathilde Etienne
Aude Extrémo
Judith Fa
Axelle Fanyo
Loïc Felix
Jean-Paul Fouchécourt
Diane Fourès
Julie Fuchs
Jean-Pierre Furlan
Elena Gabouri
Khatouna Gadelia
Cécile Galois
Lorrie Garcia
Marie-Laure Garnier
Paul Gaugler
Christophe Gay
Paul Gay
Véronique Gens
Anne-Catherne Gillet
Emiliano Gonzales Toro
Olivier Grand
Mickael Guedj
Sébastien Guèze
Hélène Guilmette
Delphine Haidan
André Heyboer
Marie-Adeline Henry
Eric Huchet
Catherine Hunold
Fabien Hyon
Enguerrand de Hys
Philippe Jarroussky
Nona Javakhidze
Caroline Jesteadt
Marie Kalinine
Marie Karall
Anna Kasyan
Violaine Kiefer
Sophie Koch
Michaël Koné
Marc Labonnette
Florian Laconi
Marc Laho
Elsa Lambert
Doris Lamprecht
Jean-Christophe Lanièce
Marc Larcher
Tomislav Lavoie
Marion Lebègue
Matthieu Lécroart
Aimery Lefèvre
Aurélia Legay
Tomy Leichtweis
Jacques Lemaire
Valentine Lemercier
Marie Lenormand
Alix Le Saux
Vincent Le Texier
Jeanne-Marie Levy
Lionel Lhote
François Lis
Luca Lombardo
Melody Louledjian
Philippe-Nicolas Martin
Clémentine Margaine
Héloïse Mas
Rémy Mathieu
Marc Mauillon
Elodie Méchain
Régis Mengus
Jennier Michel
Julien Mior
Emmanuel Monier
Anaïk Morel
Julie Morgane
Marie-Eve Munger
Laurent Naouri
Carlos Natale
Juan Antonio Nogueira
Angélique Noldus
Stéphanie d’Oustrac
Eléonore Pancrazi
Julie Pasturaud
Patricia Petibon
Gabrielle Philiponet
Anthéa Pichanick
François Piolino
Bernard Pisani
Christophe Poncet de Solages
Camille Poul
Marie Perbost
Michael Piccone
Sophie Poulain
Tatiana Probst
Yvan Rebeyrol
Sabine Revault d’Allones
Richard Rittelmann
Julie Robard-Gendre
Amélie Robins
Lucie Roche
François Rougier
Pauline Sabatier
Jean-Gabriel Saint-Martin
Francesco Salvadori
Chantal Santon-Jeffery
Vannina Santoni
Céline Scheen
Patricia Schnell
Anas Séguin
Jean Fernand Setti
Marie-Bénédicte Souquet
Philippe Talbot
Jean Teitgen
Nicolas Testé
Ludovic Tézier
Fabrice Todaro
Marie-Ange Todorovitch
Margaux Toqué
Yann Toussaint
Christian Tréguier
Catherine Trottmann
Béatrice Uria Monzon
Serenad Burcu Uyar
Florie Valiquette
Mathias Vidal
Anne-Sophie Vincent
Karen Vourc’h
Malcolm Walker
Guilhelm Worms
Eva Zaïcik
David Zobel