Le chanteur russe Evgueni Nesterenko est décédé le 20 mars dernier des suites de la Covid-19. Né le 8 janvier 1938 à Moscou, il fait ses premières armes au sein de plusieurs chorales pendant son enfance avant de bifurquer vers des études d’architecture. L’intérêt pour le chant reprend le dessus, et il se forme à Leningrand, où il développe une voix profonde dans la lignée des grandes basses russes. Après un début de carrière au sein du Mariinski, sa quatrième place au Concours Tchaikovski en 1970 lui permet d’obtenir un poste au Bolchoï. Il y est resté jusqu’en 2002, s’illustrant dans tous les classiques du répertoire russe (Rousslan et Ludmila de Glinka, La Fiancée du Tsar de Rimski-Korsakov, Le Prince Igor de Borodine et, bien sûr, Boris Godounov de Moussorgski), mais aussi Verdi (Philippe II et le Grand Inquisiter dans Don Carlo) ou Rossini (Basilio dans Le Barbier de Séville). Il a également créé plusieurs oeuvres de Chostakovitch, Sviridov et Taktakichvili. En dehors des frontières de la Russie, sa carrière l’a mené à travers toute l’Europe, à Londres, Milan, Vérone, Vienne, où il a notamment chanté sous la direction de Claudio Abbado, Carlos Kleiber ou Nello Santi. Au sein d’une discographie non négligeable, signalons quelques rôles verdiens dans des distributions prestigieuses pour Deutsche Grammophon (Nabucco sous la direction de Sinopoli, avec Cappuccilli, Dimitrova et Domingo, Il Trovatore dirigé par Giulini, avec Domingo encore, Giorgio Zancanaro et Rosalind Plowright), et un Méphistophélès pour Sir Colin Davis, entouré du Faust de Francisco Araiza et de la Marguerite de Kiri Te Kanawa (chez Philips). Parallèlement à sa carrière de chanteur, il menait une intense activité pédagogique, enseignant dès les années 1970 et publiant de nombreux articles ainsi qu’un livre, Reflections on the Profession, en 1985. Il est mort à Vienne, où il avait commencé à enseigner au Conservatoire en 1993.