Voilà une réédition qui vient à point nommé, juste avant les fêtes de Noël, pour faire redécouvrir à quel point Noël occupe une place singulière dans l’œuvre de Charpentier à qui la naissance de Jésus a inspiré de nombreuses et diverses œuvres. Cet opus est en effet la réédition de deux précédents CD des Arts Florissants, parus en 1982 et 1983 . Cette réunion est particulièrement bienvenue, tant le fil rouge, Noël, la justifie avec évidence. C’est ainsi une chance que de voir réunis sur un même CD l’oratorio de Noël In Nativitatem Domini Canticum, la pastorale Sur la naissance de Notre Seigneur Jésus Christ, les Antiennes « O » de l’Avent et les Noëls pour les instruments.
Tous composés entre 1683 et 1693, ces œuvres permettent de prendre pleinement conscience de l’homme de foi qu’était Marc-Antoine Charpentier et de découvrir de nouvelles facettes de sa dévotion, au-delà de sa célèbre Messe de Minuit. William Christie et Les Arts Florissants, comme à l’accoutumée, proposent une performance parfaite de bout en bout et nous permettent ainsi de redécouvrir le cycle des sept « O » de l’Avent, chaque antienne débutant par un « O » sublimé de longues notes suspensives créant l’atmosphère d’attente de l’Avent parfaitement restituée par l’ensemble. L’orchestre a toute l’occasion de briller dans les Noëls pour instruments et c’est également l’occasion de réécouter l’oratorio de Noël, œuvre dramatique et religieuse sans réelle postérité ainsi que la pastorale sur la naissance du Christ où le profane se mêle au sacré dans un mélange des tonalités surprenant, totalement maîtrisé par l’orchestre. L’ensemble fait preuve d’une précision et d’un sens de la nuance hors du commun, sous la baguette avisée de William Christie, toujours aussi percutant sans jamais sacrifier à l’émotion.
Le plateau vocal restitue toute la dévotion solennelle escomptée tout en offrant une prestation parfaitement ciselée. Les sopranos Agnès Mellon, Jill Feldman, Catherine Bignalet imprègnent leur performance du climat de dévotion avec grande délicatesse, et s’équilibrent parfaitement avec les tonalités plus sombres de Marie-Claude Vallet et Guillemette Laurens. Les hautes-contre Dominique Visse et Vincent Darras dialoguent avec éloquence avec l’orchestre tandis que la profonde grâce des ténors Michel Laplénie, Etienne Lestringant et Ian Honeyman ne peut que frapper l’auditeur. Enfin, la beauté saisissante des graves de Philippe Cantor, Antoine Sicot, et François Fauché, achève d’exalter toute la sensibilité de la partition.
C’est ainsi un Noël particulièrement riche que les Arts Florissants proposent de redécouvrir, entre dévotion et légèreté, adoration et ferveur.