S’il ne renouvela pas la connaissance de Rameau et de son œuvre*, le petit ouvrage que publia Jean Malignon en 1960, dans la collection Solfèges, est de ceux que l’on conserve avec gratitude et une certaine tendresse. Il est toujours disponible, en occasion, pour trois fois rien sur les sites spécialisés. Bien documenté, dans un style agréable, il eut le mérite d’éclairer toute une génération sur ce grand compositeur. C’est ce petit volume qui ressort aujourd’hui chez un autre éditeur et dont la lecture pourra satisfaire ceux qui répugnent à une approche plus universitaire, d’un tout autre poids (rappelons ici la récente parution de l’ouvrage fondamental de Sylvie Bouissou – chez Fayard –, complémentaire à celui de Girdlestone).
Lorsqu’ un ouvrage épuisé est réédité, il est de règle de confier à un spécialiste un avertissement, une introduction, des notes et un appareil critique permettant d’actualiser le texte original. Le nom du collaborateur figure alors avec humilité sous celui de l’auteur. Ici, rien de tel : Jean-Philippe Biojout, chanteur lyrique dont le chemin ne semble pas avoir croisé celui de l’autre Jean-Philippe, a déposé son nom à côté de celui de l’auteur, comme si tous deux avaient collaboré à son écriture. Ainsi affirme-t-il avoir remis « au goût du jour en le complétant » le volume en question alors qu’il signe de son seul nom une introduction qui n’est autre que le premier chapitre écrit par Jean Malignon, s’étant borné à glisser quelques mots, une citation ou quelques lignes dans le texte original, non sans y commettre des fautes d’orthographe.
Sans surprise, le corps de l’ouvrage est celui de Jean Malignon, dont le texte est repris dans sa quasi intégralité (on a évidemment supprimé les références aux microsillons). Les modestes compléments de M. Biojout n’apportent rien de tangible, et semblent servir d’artifices pour justifier sa signature. Ainsi est nommé « tableau synoptique » ce qui s’appelait « chronologie ». La bibliographie, tronquée, est actualisée avec parcimonie. Ajouté, le « catalogue des œuvres » se signale par son indigence. L’iconographie, parfois originale, est globalement appauvrie.
Dans un format voisin, le Rameau de Christophe Rousset publié par Actes Sud en 2007 (édition étrangement omise de la bibliographie du présent ouvrage) nous paraît une alternative d’une autre qualité, où l’expérience longue et intime du musicien renouvelle l’approche de la vie et de l’œuvre de l’illustre Dijonnais.
* à la différence de Girdlestone en 1957 (traduction française en 1962, augmentée par Philippe Beaussant en 1983).