Quelle vague lyrique choisir, de septembre à juin prochain, s’il fallait n’en surfer qu’une ? Cette année encore, nos rédacteurs livrent leur sélection, par ordre chronologique, des spectacles phares de la saison 2013-2014. Cette sélection a été établie à partir de Musique & Opéra autour du Monde 2013-2014 (en savoir plus)
Richard Wagner, Der Ring des Niebelungen, Opéra de Dijon, Das Rheingold, et Die Walküre, 5, 9 et 12 octobre 2013, Siegfried et Götterdämmerung, 6, 13 et 15 octobre 2013
Une production exceptionnelle, attendue depuis son annonce : un Ring complet sur deux jours, ou plus, pari fou en passe d’être gagné par Laurent Joyeux, qui signe la mise en scène. Une approche renouvelée par Brice Pauset et Stephen Sazio, et, entre autres, la Brunnhilde de rêve de Sabine Hogrefe. [En savoir plus]
Yvan Beuvard
Giacomo Puccini, La Fanciulla del West, Staatsoper, Vienne, du 5 au 17 octobre 2013
Il a fallu compter sur la détermination de grandes stars du chant lyrique pour que des œuvres méconnues, voire oubliées, soient de nouveau représentées. C’est notamment le cas de Plácido Domingo qui a souvent prêté sa voix à Dick Johnson, le cow-boy de La Fanciulla del West. Pour la première fois dans ce même rôle, Jonas Kaufmann assure la relève aux cotés de la charismatique Nina Stemme (Minnie) et de Tomasz Konieczny (Jack Rance). Aux cotés de Marco Arturo Marelli qui signe une toute nouvelle production, Franz Welser Möst mettra en relief la modernité d’une partition luxuriante. Vienne n’a donc pas lésiné sur les moyens pour cette oeuvre qui, rappelons-le, fut le plus gros succès que Puccini ait connut de son vivant. [En savoir plus]
Sylvain Angonin
Christoph Willibald Gluck, Armide, Opéra d’Amsterdam, du 6 au 27 octobre 2013
Avant avant la fête à Jean-Phi (Rameau) en 2014, c’est un peu la fête à Cricri (Gluck) cet automne : outre l’Alceste donnée par l’Opéra de Paris en septembre, le Nederlandse Opera propose la plus rare Armide le mois suivant. Production décoiffante en perspective, due à Barrie Kosky, intendant du Komische Oper de Berlin. Et distribution alléchante, puisqu’on y verra l’incroyable Karina Gauvin non pas en concert mais en scène, et son non moins excellent compatriote Frédéric Antoun en Renaud. [En savoir plus]
Laurent Bury
Richard Strauss, Elektra, Opéra National de Paris, du 31 octobre au 1er décembre 2013
Pour les straussiens qui n’ont pas eu la chance d’assister à la version flamboyante d’Aix en Provence cet été, Paris offre une nouvelle occasion de plonger dans les abimes d’une oeuvre toute en démesure. Avec Waltraud Meier dans le rôle de Clytemnestre, Philippe Jordan à la direction et Robert Carsen à la mise en scène, tous les espoirs sont permis… [En savoir plus]
Tania Bracq
George Benjamin, Written on Skin, Opéra Comique, Paris, du 16 au 19 novembre 2013
La déjà mythique (co-)production aixoise de Written on Skin, chef d’œuvre de George Benjamin, électrisera l’automne parisien le temps de trois soirées salle Favart. Aux côtés de Christopher Purves (le Protecteur), Lestyn Davies endossera l’habit du scribe pour lequel Agnès brûle d’un irrépressible désir – un rôle que l’étourdissante Barbara Hannigan devrait une fois de plus incarner dans toute sa dimension lyrico-sexuelle. Le tout sous la direction du compositeur. Sensations fortes garanties ! [En savoir plus]
Nicolas Derny
Giacomo Meyerbeer, L’Africaine, Teatro La Fenice, Venise, du 23 novembre au 1er décembre 2013
Ah Venise l’hiver (hors Carnaval) ! Quoi de plus romantique que les canaux gelés, la place Saint-Marc désertée par les touristes… Pour un peu de chaleur il suffira de pousser les portes de La Fenice. A l’affiche, une véritable rareté ! Ce n’est pas tous les jours que l’on peut voir et écouter L’Africaine de Meyerbeer. Et la température devrait monter rapidement dans le théâtre avec la bête de scène qu’est Gregory Kunde, accompagné de la trop méconnue Jessica Pratt. [En savoir plus]
Antoine Brunetto
Giuseppe Verdi, La Traviata, Teatro alla Scala, Milan, du 7 décembre 2013 au 3 janvier 2014
La Traviata sera le huitième opéra de Verdi donné sur la scène scaligère dans le cadre du bicentenaire. Pour ouvrir la nouvelle saison et terminer l’année 2013 en beauté, l’immense Daniele Gatti reviendra diriger, avec la grande Diana Damrau dans une prise de rôle à la Scala après avoir rôdé sa Violetta depuis mars dernier. On frissonne déjà de l’entendre, dans une mise en scène signée Dmitri Tcherniakov. À ses côtés, excusez du peu, Piotr Beczala, Zelijko Lucic, Giuseppina Piunti, Mara Zampieri… Magnifique affiche qui donne envie de courir à Milan dès le début du mois de décembre, ou d’aller y passer le réveillon. [En savoir plus]
Fabrice Malkani
Francis Poulenc, Dialogues des carmélites, Paris, Théâtre des Champs-Elysées, du 10 au 21 décembre 2013
Enfin ! Pour un peu, obnubilé par le bicentenaire de la naissance de Verdi et Wagner, on oubliait de célébrer le cinquantenaire de la mort de Francis Poulenc, en sa propre ville : Paris. Avant de tourner la page de 2013, le Théâtre des Champs-Elysées rattrape in extremis le coup en proposant des Dialogues des Carmélites comme on n’osait en rêver. Qui mieux qu’Olivier Py pour mettre en scène cet opéra trempé dans l’eau bénite ? Qui mieux que Patricia Petitbon (Blanche), Sandrine Piau (Constance), Sophie Koch (Mère Marie) et Véronique Gens (Madame Lidoine) pour réciter le bréviaire ? Reste à savoir si avec Jérémie Rhorer, moins attendu dans ce répertoire, la messe sera dite.
Christophe Rizoud
Jacques Offenbach, La Grande Duchesse de Gérolstein, Paris, Théâtre de l’Athénée Louis-Jouvet, du 12 décembre 2013 au 5 janvier 2014
Comme tous les hivers maintenant, Les Brigands s’emparent de l’Athénée. A force de tourner gentiment – mais joyeusement – autour du pot (Croquefer, L’Île de Tulipatan, Le Docteur Ox, Geneviève de Brabant), il fallait bien que la petite compagnie s’attaque à un gros morceau : ce sera La Grande Duchesse de Gérolstein. L’intimité du lieu, la bonne humeur communicative de la troupe, les voix toujours au poil, l’excellent Flannan Obé et la guest-star de choix Isabelle Druet : tous serviront Offenbach comme nulle part ailleurs à Paris ! [En savoir plus]
Maximilien Hondermarck
Vincenzo Bellini, La Sonnambula, Gran Teatre del Liceu, Barcelona, du 27 janvier au 17 février 2014
Pour le plaisir de retrouver l’un des fleurons du bel canto au Liceu, avec notamment, Juan Diego Flórez, tellement à l’aise dans le rôle d’Elvino, mais aussi Diana Damrau et Patricia Ciofi en alternance (l’occasion de voir le spectacle deux fois) ou encore Michele Pertusi, le tout sous la direction de Daniel Oren. [En savoir plus]
Catherine Jordy
Charles Wuorinen, Brokeback Mountain, Teatro Real, Madrid, du 28 janvier au 11 février 2014
Gérard Mortier l’avait commandé pour le New York City Opera, mais c’est à Madrid que sera créé l’ouvrage tiré du récit tragique d’Annie Proulx. Charles Wuorinen ne cache pas son admiration pour le film d’Ang Lee oscarisé et couronné par un Lion d’Or à la Mostra, mais l’adaptation scénique de cette nouvelle extrêmement concise, où abondent silences et non-dit, pose un tout autre défi. La romancière en signe le livret et Ivo van Hove, qui a déjà transposé Visconti, Bergman, Cassavetes et Antonioni au théâtre et revisité le Ring au Vlaamse Opera (2006-2008), la mise en scène. Le ténor lyrique Tom Randle (Jack) et le baryton basse Daniel Okulich (Ennis) sauront-ils faire oublier, le temps d’une représentation, le couple mythique formé par Heath Ledger et Jake Gyllenhaal ? Une création à haut risque, mais également riche de promesses ! [En savoir plus]
Bernard Schreuders
Philippe Boesmans, Au Monde, La Monnaie, Bruxelles, du 30 mars au 12 avril 2014
Le compositeur belge Philippe Boesmans a contribué à tisser un nouveau lien affectif entre le public et l’opéra contemporain. Sans tourner le dos aux acquis de la révolution atonale, Boesmans – dont la culture opératique ne se dément pas – enrubanne chacun de ses opéras d’une telle couche de clins d’yeux, de douce ironie, d’humour et de citations que nul ne peut s’y sentir égaré. Il rencontre ici le dramaturge Joël Pommerat, qui adapte sa pièce Au Monde. Est-ce un hasard si des artistes de l’envergure de Stéphane Degout, de Patricia Petibon et de Yann Beuron participeront à la création ? Un opéra dirigé par Patrick Davin. [En savoir plus]
Camille De Rijck
Giuseppe Verdi, Ernani, Opéra de Monte-Carlo, du 22 au 29 avril 2014
Le printemps prochain, il y aura trois bonnes raisons de se rendre dans la Principauté. Assister à Ernani ; cette œuvre puissamment romantique, qui a consacré la réputation du jeune Verdi peu après Nabucco, est assez rarement représentée pour mériter un déplacement. De surcroît, le bandit Ernani, Don Juan d’Aragon, sera Ramon Vargas, ténor lyrique, aujourd’hui au sommet de son art. Avec cette prise de rôle, le chanteur mexicain aborde une nouvelle phase d’une carrière exemplaire, menée avec prudence — lui, qui a pris, dit-il, Alfredo Kraus pour modèle. La troisième raison va sans dire. Quoi de plus attirant, au retour des beaux jours, que les charmes du « Rocher fleuri », qui possède, au bord de la grande bleue, l’un des plus beaux théâtres du monde (construit, lui aussi, par Garnier) ? Et, cerise sur le gâteau : le metteur-en-scène et maître des lieux, Jean Louis Grinda, s’est entouré d’une équipe artistique entièrement italienne ; en plus de Vargas, on pourra entendre la soprano Svetla Vassileva (Elvira), applaudie en 2011 dans Francesca di Rimini à l’Opéra Bastille aux côtés de notre Roberto national, et Ludovic Tézier (Don Carlo, roi d’Espagne). – [En savoir plus].
Brigitte Cormier
Gioachino Rossini, Cenerentola, Otello, Stabat Mater, Petite Messe Solennelle, Salzbourg, festival de Pentecôte, du 5 au 9 juin 2014
Comment résister à ce festin rossinien en forme de marathon, déjà signalé par notre chère Hélène dans une brève en mai dernier ? Cecilia Bartoli en Angelina et en Desdemona, Pappano au pupitre pour le Stabat Mater et la Petite Messe Solennelle, avec rien moins que Stoyanova, Garanca, Beczala et Schrott pour le premier et Mei, Kasarova, Brownlee et Pertusi pour la deuxième, avec en soirée un gala réunissant gloires d’hier et d’aujourd’hui, voilà bien de quoi combler les amoureux de Rossini et les amateurs de bel canto, au vrai sens du terme !
Maurice Salles
Giuseppe Verdi, Macbeth, Munich, Bayerische Staatsoper, les 27 juin et 1er juillet 2014
Depuis quelques mois, Anna Netrebko semble résolue à faire évoluer de façon radicale son répertoire : un à un elle abandonne les rôles qui ont fait sa gloire, Lucia, Elvira, Juliette, Manon, au profit d’emplois plus lourds et sans doute plus adaptés à ses possibilités vocales actuelles, parmi lesquels trois opéras de Verdi et non des moindres : sa récente Giovanna d’Arco à Salzbourg a fait sensation, et déjà se profile la Leonora du Trovatore à Berlin en décembre et surtout, en fin de saison, Lady Macbeth qu’elle abordera à Munich aux côtés de Simon Keenlyside. L’excellent Ildar Abdrazakov incarnera Banco, et Macduff sera interprété rien moins que par Joseph Calleja. Une distribution prestigieuse pour seulement deux soirées, qui promettent d’être électrisantes. Inutile de dire que les places seront chères, mais quand on aime… [En savoir plus]
Christian Peter
Franz Schubert, Winterreise, Festival d’Aix-en-Provence, Juillet 2014
C’est un peu l’hiver en été ! Le Festival d’Aix-en-Provence présentera en juillet prochain une production très originale, puisqu’elle mêlera des lieder de Schubert et des projections vidéo de William Kentridge. C’est à l’imagination fertile de Bernard Foccroulle qu’on doit ce projet hors du commun. Les rapports du sud-africain Kentridge à la musique sont nombreux et féconds : on se souvient de ses mises en scènes de Wozzek, de La Flûte Enchantée, et de la très spectaculaire production du Nez de Chostakovitch en 2011. Il s’attaquera ici à une œuvre plus abstraite, sommet de l’art du lied, les 24 mélodies du Voyage d’Hiver de Schubert, chantées par le spécialiste incontesté du genre, Matthias Goerne. Les détails ne sont pas encore connus, mais on frémit déjà d’impatience ! [En savoir plus]
Claude Jottrand
Richard Wagner, Der Ring des Nibelungen, Tiroler Festspiele Erl, du 18 juillet au 3 août 2014
Au contraire de à Bayreuth, point n’est besoin d’attendre de 5 à 10 ans pour avoir des billets au Festival d’Erl… De plus, ce sera le premier Ring que dirigera Gustav Kuhn dans la nouvelle salle construite il y a un an, et qui remplace le théâtre de la Passion utilisé jusqu’ici. Une grande salle, une scène ultra-moderne et l’une des plus grandes fosses d’Europe en font un outil particulièrement adapté au théâtre lyrique. Le Ring y sera donné en 2014 et 2015, suivant les dates, en deux week-ends ou en quatre jours à la suite : une pratique rare, autre intérêt de ce cycle dont les solistes, un peu à la manière de Glyndebourne, travaillent les rôles dans le cadre de l’Accademia di Montegral. [En savoir plus]
Jean-Marcel Humbert