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5 questions à Véronique Gens

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5 questions
6 juin 2003

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Vous menez carrière à la fois dans la mélodie et dans l’opéra… Mais si vous deviez choisir ?

C’est une question difficile : je dirais que les deux sont indispensables ! J’ai besoin de l’intimité du récital de mélodie française. Dans la mélodie, il y a une façon particulière d’utiliser sa voix, un grand confort, et puis, un récital de mélodie, c’est aussi un rapport particulier avec les spectateurs. Pour moi, tout cela, est essentiel. Mais j’ai tout aussi besoin des costumes, des perruques, de la possibilité que l’opéra offre de se glisser dans la peau d’un personnage, plaisir presque enfantin du déguisement. C’est l’opposé. A l’opéra, on est quelqu’un d’autre, comme libéré de soi-même, et il n’y a plus de limite. En récital, on n’a que sa voix. Oui, les deux sont vraiment indispensables, à mon équilibre vocal, et aussi à mon équilibre artistique. Mais je crois qu’il en est ainsi pour tout  » vrai  » chanteur !

Une carrière comme la votre, est-ce plutôt fait de passion, ou de raison ?

De raison, surtout. Il ne faut pas faire n’importe quoi, et je suis très prudente dans mes choix. Pendant très longtemps, je me suis cantonnée au répertoire baroque, et quand je suis passée à mon premier Mozart, j’étais terrorisée ! Même chose quand j’ai abordé les Nuits d’été. Et pour Vittelia qui est un rôle extrêmement difficile. J’ai cru que j’allais me briser la voix ! Et finalement, tout s’est bien passé. Aujourd’hui, Vittelia est même mon rôle préféré, celui qui me permet de plus exprimer, les extrêmes, la variété des couleurs ; c’est un personnage avec un vrai développement, contrairement à la Comtesse ou Fiorigili qui sont plus  » monochromatiques « . Mais il faut la passion, pour franchir les étapes, la passion aide à progresser, il faut être passionnée, pour avancer, pour se lancer de nouveaux défis. Là aussi, je crois qu’il faut les deux, la passion, et beaucoup de raison !

Vous chantez partout dans le monde, mais on ne vous entend pas à l’Opéra de Paris. Pourquoi cela ?

C’est une question d’engagement, on ne m’a jamais encore proposé de rôle ! J’adorerais aborder tous mes rôles de Mozart à l’Opéra de Paris, mais on ne me les a pas demandés. En revanche je chante régulièrement au Théâtre des Champs Elysées, et c’est un peu une histoire d’amour que je vis avec ce public des Champs Elysées, je m’y sens un peu  » chez moi « . Et du coup, à chaque fois que j’y chante, je suis un peu plus stressée, car je ne veux vraiment pas les décevoir ! En fait, j’ai un rapport tout particulier avec le public français, mais comme beaucoup d’artistes françaises, hélas, je chante surtout à l’étranger !

Pouvez-vous nous parler de vos prochains projets ? Vos futurs disques ? Les rôles que vous rêvez d’aborder ?

Je vais chanter beaucoup de Nuits d’Eté, dans les Festivals, en France. Je suis très contente de cette série de concerts ; en abordant les Nuits d’Eté au disque, j’étais assez inquiète, c’est un cycle ou il y a tellement de grandes références. D’ailleurs, le disque n’a pas été très bien accueilli par la critique… On m’a d’abord proposé de chanter les Nuits d’été à l’étranger, et là, avec l’année Berlioz, on me les demande un peu partout en France. Cela me fait très plaisir ! Ensuite, il y a tous ces merveilleux rôles de Mozart. Mozart est mon compagnon, j’ai des engagements, jusqu’à dans très longtemps, pour chanter les Noces, la Clémence de Titus, Don Giovanni. J’aime ce théâtre, cette musique, ces rôles font vraiment partie de moi, et je ne pourrai pas m’en passer. Sinon, pour le disque, je viens d’enregistrer l’Orfeo de Monteverdi avec Emmanuel Haïm, où je chante Proserpine. Les Noces de Figaro avec René Jacobs, avec qui j’adore travailler -il a une façon tellement belle et personnelle de diriger Mozart ; je suis d’ailleurs particulièrement contente de ce disque qui prolonge ce que nous avons entrepris pour Cosi Fan Tutte. Et à la rentrée, un oratorio de Scarlatti, avec Fabio Biondi, La Santissima Trinità. D’autres projets, enfin, mais là, il est encore un peu trop tôt pour que je vous en parle ! Au delà, j’ai beaucoup de rêves, même si aujourd’hui je suis déjà comblée par les rôles que je chante. Mes ces rêves restent très raisonnables : Desdémone, la Maréchale, dans un autre genre, Poppée de Monteverdi, que je rêve vraiment d’aborder, et puis, pourquoi pas, Octavian, le compositeur dans Ariane, et les quatre derniers lieder.

Vous faites vibrer les spectateurs dans les salles d’opéra, mais vous Véronique Gens, qu’est-ce qui vous fait vibrer ?

Je n’ai pas de passion particulière, je suis chanteuse, c’est un métier exigeant, difficile, mais c’est aussi une chance ! Mais ce qui m’importe surtout, c’est ma vie, ma vraie vie, en dehors du chant. J’ai une petite fille et j’espère avoir d’autres enfants. C’est essentiel, vraiment le plus important. J’apprécie le simple bonheur d’aller chercher ma fille à l’école. Hélas, dans de métier, ce n’est pas toujours si évident !

Frédéric Théret
 

 

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