Vous avez un look de quarter back, comment êtes-vous devenu chanteur d’opéra ?
C’est un coup de chance, je suppose. L’opéra est une discipline artistique qui devient particulièrement intéressante: l’institution culturelle qu’elle a représenté pendant des centaines d’années est en train de se muer en véritable concurrent du cinéma et des comédies musicales. Voilà probablement pourquoi l’accent est mis sur le côté visuel d’une production d’opéra; le look d’un chanteur devenant aussi important que sa voix. Je crois avoir profité de ce mouvement.
Un tramway nommé désir d’André Previn semble avoir été une étape importante de votre carrière ; que représente pour vous le rôle de Stanley ?
Avant le tramway j’étais principalement reconnu pour mes interprétations des rôles de Billy Budd et de Figaro dans le Barbier de Séville. Stanley Kowalski se situe à l’opposé de Billy Budd, ce fut donc une grande opportunité pour démontrer que j’étais capable de jouer autre chose que les grands naïfs et les types sympathiques. Aux Etats-Unis, Stanley est une véritable icône qui a été incarnée par les plus grands comédiens, c’est donc une responsabilité de lui rendre justice en tant qu’acteur. Plus concrètement, mon succès personnel dans le Tramway m’a permis d’aborder un plus grand nombre de créations, comme par exemple le Choix de Sophie à Londres en décembre.
Vous venez de chanter à Zurich, les Indes Galantes sous la direction de William Christie; avez-vous d’autres projets dans le domaine de la musique ancienne ?
Je chanterai le rôle-titre du Retour d’Ulysse dans sa patrie le mois prochain à Munich. Il s’agit d’une reprise de l’intense production de David Alden qui avait été créée en 2001. C’est une musique vraiment fabuleuse. Je suis toujours stupéfait de constater à quel point le langage de Monteverdi est contemporain; il est manifeste que les êtres humains n’ont pas beaucoup changé depuis qu’il a écrit cet opéra il y a plus de trois cents ans. C’est une œuvre qui traître de sujets de société comme le pouvoir, la solitude, le mariage, la fidélité, le patriotisme, la jalousie, la violence, le sexe et la spiritualité. Sa musique est extrêmement humaine, plus vériste que n’importe lequel des opéras véristes.
Quels sont vos principaux projets pour les saisons à venir ?
Je travaille à trois créations mondiales ainsi qu’à une comédie musicale et à plusieurs prises de rôle. J’incarnerai le rôle de Nicolas II dans Nicholas and Alexandra, un opéra qui évoquera la fin du dernier Tsar de Russie. Placido Domingo incarnera Raspoutine, le célèbre confident de la Tsarine. C’est toujours une riche expérience que de créer un opéra et le fait d’aborder ce dernier dans ma ville de résidence est un plaisir double. Je chanterai aussi pour la première fois Rodrigo dans le Don Carlo de Verdi au printemps à San Diego; c’est une perspective qui m’excite beaucoup dans la mesure où je trouve que ma voix s’adapte particulièrement bien au style de Verdi, j’espère que cette expérience m’ouvrira de nombreuses portes dans ce répertoire. Après Don Carlo je chanterai le Doktor Faust de Busoni à San Francisco ; il s’agit d’une pièce merveilleuse tant sur le plan musical que dramatique. C’est un rôle long et exigeant qui conviendra très bien à ma voix. Quoi qu’il en soit, ce sera un tour de force et j’attends ce challenge avec impatience!
Saviez-vous que certains de vos fans vous baptisaient le Barihunk (ndlr: traduction libre… barymuscle) cela vous fait-il plaisir ?
C’est toujours un plaisir d’être admiré, mais je me demande parfois si ce genre d’admiration va plus loin que l’aspect strictement physique. Quoi qu’il en soit, tout le monde est libre de penser de moi ce qu’il veut, ce ne sont pas mes affaires. Très franchement, je préfère nettement être apprécié pour mon talent artistique que pour mes biceps!
Camille De Rijck