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5 questions à Jean-Yves Sebillotte

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5 questions
9 février 2008

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Jean-Yves Sebillotte est l’un des pianistes de l’Opéra de Paris.

Comment devient-on pianiste de l’Opéra de Paris ?

Par concours de recrutement. Je voulais au départ être interprète. A l’issue de mes études de piano et percussions au Conservatoire National de région de Versailles, mes professeurs, notamment Sylvio Gualda, m’ont suggéré de tenter ma chance car ils trouvaient que le poste correspondait à ma formation. J’ai passé le concours avec succès en juin 1983.

En quoi un pianiste à l’Opéra de Paris est-il différent d’un pianiste ordinaire (si tant est qu’il le soit) ?

Tout dépend du pianiste ! Nous sommes deux à l’orchestre, mais il y a également sept chefs de chant pour le lyrique, quatre pour les chœurs, sept pour le ballet et cinq pianistes pour les cours de danse.
En ce qui me concerne, je suis musicien de l’orchestre avec comme profil de poste : pianiste, jouant les claviers (célesta, glockenspiel à clavier) et la percussion (sauf timbales et caisse-claire), ce qui signifie qu’il me faut être complet, avoir un rythme rigoureux tout en ayant une grande souplesse pour suivre un chef et tenir compte « des attaques » des différentes familles d’instruments de l’orchestre.
En dehors de mes fonctions à l’Opéra de Paris, j’ai la possibilité de faire des concerts, des tournées, souvent en musique de chambre (notamment avec les collègues et amis de l’orchestre), en récital de piano ou en récital avec chanteurs. J’ai également enregistré plusieurs disques en solo ou en duo.

A l’Opéra, quel est votre répertoire de prédilection ?

D’un point de vue personnel, j’aime particulièrement Mozart, les derniers Verdi, Puccini, Strauss et Wagner. En tant qu’instrumentiste, ma préférence va vers Lulu d’Alban Berg et Grandeur et Décadence de Mahagonny de Kurt Weill car il y a une très belle partie de piano dans chacun de ces ouvrages. En revanche, le répertoire du bel canto (Bellini, Rossini…) met en valeur les voix mais s’avère moins gratifiant pour un musicien car l’orchestre tient plus souvent le rôle d’accompagnateur.
En fait, les musiques de ballet offrent davantage de parties d’orchestre intéressantes pour nous, pianistes – Pétrouchka, L’oiseau de feu de Stravinsky, Prokoviev – même si là encore il y a des partitions plus fastidieuses à jouer mais incontournables dans ce répertoire : Giselle, La Bayadère, Don Quichotte. J’ai également l’occasion d’interpréter en soliste des concertos (Ravel, Hindemith, Stravinsky…) et des œuvres pour piano sur scène.

Vos fonctions vous amènent à rencontrer des chanteurs. Quels sont ceux qui vous ont marqué ?

Il y a d’abord les chanteurs déjà confirmés avec qui j’ai eu plus d’échanges, comme Natalie Dessay, notamment lors de la Flûte Enchantée à Garnier en 2000, et Roberto Alagna sur différentes productions. Je pourrai citer également Jean-Philippe Lafont, Nicolas Cavalier, Stéphane Degout et plusieurs chanteurs de la production d’Ariane à Naxos il y a trois ans, Jean-Paul Fouchécourt et Franck Ferrari plus récemment.
Il y aussi les chanteurs avec qui je n’ai pas eu de contacts privilégiés mais qui m’ont marqué comme José Van Dam lors de la création de Saint-François d’Assise, Luciano Pavarotti dans La Bohème, Placido Domingo dans Tosca avec Seiji Osawa au pupitre.
Il y a enfin les chanteurs qui ont étudié à l’Atelier Lyrique de l’Opéra et que j’accompagne en concert, comme Sylvie Althaparro, et Hye-Youn Lee avec qui j’ai joué le 13 octobre dernier au Studio de l’Opéra Bastille.

J’ai aussi eu en dehors de l’Opéra une collaboration fructueuse sur le plan musical et humain avec plusieurs chanteurs, notamment Françoise Pollet lors d’un très beau récital à Bourges en 1997, Sophie de Tillesse avec qui j’ai enregistré un CD de mélodies Polonaises, la soprano Karen Vourc’h, la soprano Roumaine Micaela Mingheras lors d’une tournée en Roumanie et Francis Dudziak lors d’une soirée musicale et littéraire autour des surréalistes. Jean Rochefort nous avait alors astucieusement conseillé pour la mise en scène.

Je voudrais mentionner aussi les chefs d’orchestre car j’ai eu un excellent contact avec la majorité d’entre eux, notamment Seiji Osawa, Georges Prêtre, Jeffrey Tate, Myun-Wung Chung, Armin Jordan, James Conlon, Marek Janowski (avec l’orchestre philarmonique de Radio-France) et plus récemment Philippe Jordan. Il est vrai que cela dépend aussi de la partie que j’ai à jouer au sein de l’orchestre. S’il s’agit de piano, mon rôle est souvent plus important et les échanges humains sont plus proches. Mon expérience la plus marquante à ce propos a été de jouer le Capriccio de Stravinsky avec Valery Gergiev et l’orchestre du théâtre Marinski lors d’un gala exceptionnel au Palais Garnier le 6 novembre 2005. Ce chef a un tel charisme, une telle énergie que mon jeu en a été transformé ; j’ai joué jusqu’au bout de mes capacités musicales.
Il y a d’autres chefs avec qui j’ai eu un contact moins privilégié mais que j’admire beaucoup : Zubin Mehta, Esa-Pekka Salonen, Christof von Donnanyi,…
Enfin, j’ai également la chance de travailler de manière plus approfondie avec les danseurs et notamment les étoiles de l’Opéra lors de la préparation des ballets pour lesquels je joue en soliste. Cela m’a permis de mieux appréhender cette discipline artistique très exigeante qu’est la danse.

Entre piano et chant, votre cœur balance ?

J’aimerais pouvoir prendre le temps d’étudier le chant mais le contact avec le piano reste viscéral et fascinant. La variété des répertoires est immense : solo, mélodies, musique de chambre. Il est aussi possible au piano de recréer un orchestre sous ses doigts en réduisant les partitions d’orchestre ou en jouant les transcriptions déjà réalisées. J’ai encore beaucoup d’œuvres à déchiffrer et à interpréter ; les œuvres trop peu jouées m’attirent aussi. Bref, ma passion pour le piano me suffit. Elle va encore m’occuper longtemps !

 

Propos recueillis par Christophe Rizoud

© Armelle de Brichambaut

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