Dans le cadre des consignes sanitaires destinées à enrayer en France la pandémie de COVID-19, la décision gouvernementale de prolonger d’au moins trois semaines la fermeture des lieux culturels a suscité une vive émotion. Pour exemple, la lettre que la directrice de l’Opéra de Lille, Caroline Sonrier, vient d’adresser à son public (voir ci-dessous).
Lettre ouverte aux spectatrices et spectateurs 20.21
Madame, Monsieur,
Les annonces gouvernementales du 10 décembre dernier nous ont amené.e.s à annuler et reporter de nouveau les représentations que nous avions prévu de partager avec vous. Tout était prêt pourtant, dans le respect le plus strict des mesures sanitaires les plus rigoureuses…
Nous ne souhaitons pas commenter plus avant ces décisions.
Mais nous voulons souligner ce qu’elles signifient pour nous.
Depuis des mois, nous adaptons notre programmation à chaque nouveau cadre réglementaire. Nous annulons, remboursons, reprogrammons, changeons d’horaire ou de programme, nous répétons, nous continuons de rendre possibles les créations à venir, et cela n’est pas très grave au fond. Les artistes ne cessent de s’adapter avec nous, avec vous. Car notre mission demeure de rendre possibles des moments de partage, d’émotion et d’intelligence collective autour d’une œuvre.
Ce qui nous inquiète aujourd’hui, c’est de comprendre que notre mission de service public n’est pas considérée comme « essentielle » à la vie quotidienne. Comme précédemment pour les librairies, ce qui nous est signifié, à vous comme à nous, c’est que la culture, les arts et le spectacle vivant sont superflus, ou qu’une société peut en réalité s’en passer.
Nous sommes persuadés du contraire. Vivre ensemble et faire société, c’est aussi s’ouvrir à l’autre, rester curieux, être vivants en se réunissant au concert, au théâtre ou à l’opéra. Tout simplement. Nous craignons en ce moment que notre imaginaire collectif ne s’épuise.
Nous pensons surtout aux créateurs, aux créatrices, aux artistes et aux interprètes privé.e.s de votre présence. Répéter, s’entraîner, chanter, jouer, danser seul.e.s n’est pas raisonnable bien longtemps. Créer est un besoin vital pour eux, comme la création l’est pour nous tous.
Nous allons attendre comme vous début janvier, nous allons à nouveau tout préparer pour vous accueillir. Nous vous attendons avec la même impatience joyeuse. Et nous vous remercions des nombreux témoignages de soutien que vous prenez le temps de nous adresser. Nous savons ainsi que cette impatience est partagée, que vous avez comme nous besoin d’art et de culture, et que cette nécessité nous réunit.
Nous vous souhaitons de belles fêtes de fin d’année,
Caroline Sonrier, et l’équipe de l’Opéra de Lille